Le Chef de l’Etat, s’adressant dans son discours aux jeunes et aux étudiants, leur demande de respecter l’ordre, la discipline et le sérieux.
Certains, toujours dans les coins et à voix basse, champions de la critique négative, trouvent qu’il y a là des manœuvres policières… On serre la vis… prétend-on. Je trouve cette attitude franchement Irréaliste, voire Irresponsable.
J’ai l’avantage de fréquenter l’Université, et plus d’une fois, je suis sortie de la salle de cours humiliée, la bouche amère, parce qu’une horde d’étudiants islamistes, la bave aux commissures des lèvres, les yeux exorbités, l’air de forcenés, ouvraient la porte, intimant l’ordre aux élèves de boycotter le cours, ignorant la présence d’un professeur auquel la sagesse commande de ne pas broncher. Les étudiants de fin de cycle refusent d’abord d’obtempérer, puis le chahut, les menaces, les hurlements ont raison de leur résistance. Terrorisée et silencieuse, la majorité laborieuse se soumet à la minorité victorieuse.
J’approuve sans réserve la position du ministre de l’Education et de la Science: M. Mohamed Charfi compte parmi les ministres qui forcent l’admiration, car il a le courage de ses opinions. La ligne de conduite de son programme d’action est logique. On sait qui il est; on l’aime ou on ne l’aime pas, c’est autre chose.
Cependant, mon opinion personnelle est qu’il aurait dû réagir plus tôt. La fermeté est le contraire du laxisme et ne s’oppose pas au concept démocratique, car de plus en plus l’Université se dirige vers le chaos.
Je suis, par principe, contre la dissolution des associations, des unions, des syndicats, qui ont pour but de réunir des personnes de bonne volonté, qui œuvrent pour la sauvegarde des valeurs, qui militent pour un mieux-être, pour la liberté, pour la protection des sites, des animaux… Les associations doivent être encouragées car elles enseignent l’esprit d’équipe, d’altruisme, et elles sont très récentes dans nos coutumes. La personnalité arabe est individualiste, c’est une nature.
Mais quand le groupe devient menaçant, quand il empiète sur la liberté de l’autre, quand il menace l’intégrité physique de l’autre, quand il viole les droits de l’autre, quand il l’agresse en se permettant de le juger, d’ailleurs sans droit, quand il cherche à lui imposer une forme de pensée et enfin une dictature, alors je suis désolée, le groupe doit être combattu, et doit être placé devant ses responsabilités.
A propos de responsabilité, on reste perplexe devant l’inconscience de certains jeunes qui croient qu’ils peuvent casser, injurier, proférer des menaces de mort, calomnier les gouvernants, en toute impunité. Je ne comprends pas sur quoi ils se basent pour croire à leur impunité. Il y a des lois et nous leur sommes tous également soumis. Quand on a dix-huit ans et donc a atteint la majorité, on doit savoir que Dame Société a tous les pouvoirs pour se défendre et qu’elle n’a cure de l’infantilisme.
Il est incontestable que tous les étudiants ont des problèmes, naturels, dirai-je. D’ailleurs, l’Université est le symbole même de l’exode rural : crises d’identité, crises d’adolescence tardive, enivrement sous le choc de libertés nouvelles. Après la discipline du lycée, les brides de la famille : ils font leurs premiers pas dans le vide, ils rentrent peu à peu dans les rouages sociaux, ils manquent d’encadrement.
Ce sont là leurs problèmes qu’ils doivent chercher à résoudre, leur rôle n’est pas de renverser le régime. Ont-lis un régime de substitution? Non, alors, foutaise!.
La destination de l’Université est de prodiguer le savoir, les activités annexes ne peuvent qu’être culturelles, artistiques, philanthropiques, sportives. Dans le monde évolué, les étudiants montent leur troupe théâtrale, musicale. Ils créent des clubs de peinture, d’art plastique; des groupes de jeunes volontaires se constituent pour participer aux secours des sinistrés, d’autres rendent visite aux personnes âgées esseulées dans les asiles. Ils organisent des manifestations sportives, des tournois de jeux, de dames, d’échecs…
Il semble que certains de nos jeunes manquent d’imagination. A moins qu’il y ait une pathologie quelque part, comment expliquer que certains jeunes ne se réunissent que pour la grève, la violence, la casse?
L’année universitaire coûte très cher aux contribuables, à l’Etat. Si elle est “séchée” , elle coûtera double. Pourtant il y a une autre catégorie de jeunes moins nantis, des manuels, qui cherchent un travail, qui veulent produire, contribuer à i’économie nationale. On se demande si ceux-là ne seraient pas en droit de réclamer les locaux et les habitations des étudiants qui ne sont pas productifs, pour les occuper. Ce seraient des foyers de jeunes travailleurs qui triment pour quatre sous et qui sont souvent des soutiens de famille. N’est-il pas impossible que l’Etat soit amené un jour à y songer, n’est-il pas normal qu’on accorde des avantages aux plus méritants?
Quant à la présence de la police au sein de la faculté, j’avoue avoir été choquée au départ, c’est tout à fait contraire à mes convictions, mais après avoir constaté qu’à l’intérieur de la faculté, tout peut basculer en un laps de temps, je trouve sa présence sécurisante.
C’est le philosophe allemand Goethe qui dit: “Je préfère une injustice à un désordre”.
L’Université est un acquis de tous les Tunisiens, il faut tout faire pour la préserver et lui maintenir un niveau honorable sinon supérieur. Ses cadres doivent être recherchés. N’ayant pas de fortune naturelle, la Tunisie doit pouvoir compter sur des compétences.
Si je parais aujourd’hui dure, et peut-être même amère, c’est que je constate dans mon entourage estudiantin qu’on n’a pas encore tiré les leçons de la guerre du Golfe: cela va être une lutte acharnée pour la survie du Tiers-monde. Alors, quand on entend des slogans tels que “Saddam, notre héros, multiplie notre repos”, quand les étudiants soutiennent l’Irak, la Palestine, Mandela… en arrêtant le travail, je ne puis réprimer ma révolte.
II y a enfin une dernière chose que je voudrais signaler. Est-ce normal d’occuper les lieux de la Fac, de mettre des cassettes de Coran très fort, avec des banderoles suspendues qui vous mènent de Caligula, à Néron, aux martyrs? Franchement, est-ce là que peut s’épanouir la personnalité de jeunes entre 20 et 25 ans? Nous sommes un Etat laïc, notre religion occupe une grande place dans notre cœur et notre âme; pourquoi une minorité devra-t-elle nous infliger des stress et de l’angoisse? Je respecte l’opinion des islamistes tant qu’elle respecte la mienne.