Taslima Nasreen est condamnée, à mort pour avoir, entre autres, dénoncé la condition de vie d’esclave des femmes de son pays, pour avoir contesté le pouvoir de vie et de mort des hommes sur les femmes. Ses juges? Des intégristes fanatiques musulmans qui, vaincus et impuissants face à l’évolution du Cosmos, face à l’économie internationale, face à la puissance pour vivre le leurre des maîtres absolus après Dieu.
Taslima Nasreen a trouvé asile en Suède. Petite par la taille, grande par le cœur, cette terre d’asile a toujours été présente dès qu’une lueur d’espoir de liberté apparaissait dans les horizons lés plus lointains.
Invitée en France par Bernard Pivot pour présenter son livre à l’émission télévisée «Bouillon de Culture», Taslima Nasreen eut droit à un visa de 24 heures accordé par les autorités françaises. Messieurs Pasqua, Juppé et Sarkozy, craignant pour la sécurité, préférèrent abréger au maximum son séjour en France.
Les Français intellectuels, libres penseurs, littéraires, l’homme de la rue, certains dirigeants, ont crié au scandale: le pays des Droits de l’Homme, celui des libertés, refuse à une personne persécutée, aux abois et condamnée à mort pour un délit d’opinion, pour ses écrits, une entrée de plus de vingt quatre heures? Alors que sur son sol vivent des fanatiques religieux commanditaires de crimes à distance et des intégristes de tout bord!
Quel danger pour la Démocratie peut représenter Taslima Nasreen? Aucun! La France craindrait-elle des représailles des fanatiques, auquel cas, si la Liberté a peur par anticipation du fanatisme, quel triomphe pour ce der nier! Certains politiques ont qualifié l’attitude de Messieurs Juppé et Pasqua de bavure! Pas tout à fait – c’est gauche, c’est maladroit, mais – c’est bien réfléchi, c’est bien calculé et en tant que Tunisienne je leur dis: «Message reçu 5/5! on vous a compris».
Les dirigeants français connaissent bien la Tunisie et ses lois en matière de statut personnel de la femme tunisienne. Ils savent pertinemment que celle-ci, depuis le premier jour de l’indépendance, est devenue une citoyenne à part entière; qu’elle est tutrice de ses enfants mineurs en l’absence de leur père ou parfois même en même temps que lui; qu’elle a le droit au travail, le droit à la contraception, le droit à l’avortement, le droit au divorce, le droit aux études, le droit au nom même si elle est de parents inconnus, le droit au voyage, le droit au vote. Ni répudiation, ni polygamie, ni hijab etc…
Et ils savent aussi que les femmes tunisiennes sont loin d’être soumises à la fatalité; leurs droits menacés, elles n’hésiteront pas à descendre dans la rue – mais en désespoir de cause elles pourraient songer à quitter le pays. Le gouvernement français pense, peut-être, que si l’Algérie venait à basculer dans l’obscurantisme, si les intégristes musulmans prenaient le pouvoir, une dizaine de millions de Taslima Nasreen jailliraient du Maghreb. Que faire alors? Il faut que celles-ci sachent qu’un visa n’est pas un droit (cela on le sait déjà, même si cela nous reste en travers de la gorge, nous militantes intellectuelles éprises de libertés et convaincues des valeurs démocratiques). Le message me paraît clair. «Ne comptez pas sur nous, ne comptez pas avec nous».
Les Tunisiennes, plus qu’aucune femme arabe ou arabo-musulame, sont les cibles de choix des fanatiques musulmans, mais les vrais ennemis sont les prédateurs de l’ombre, ceux qui estiment que les Tunisiens vivent régis par des lois non islamiques ou anti-isla miques. Ces derniers ont toujours cherché à nous déstabiliser, mais la guerre du Golfe les a démasqués. Et l’instruction des Tunisiennes leur a fait barrage.
Il est évident que les femmes tunisiennes n’ont aucun combat contre les hommes tunisiens (les rivalités, les jalousies, la phallocratie, les réactionnaires… Tout cela existe comme partout) mais la femme tunisienne ne compte pas sur les démocraties occidentales pour l’aider à repousser l’intégrisme religieux autant qu’elle compte sur ses pairs, ses alliés, ses partenaires, à savoir ses frères, ses fils, les pères, les époux, les amis…
Taslima Nasreen aurait été estimée à priori comme étant une «excitée», une «illuminée» par certains responsables français dont la patrie est réputée être généreuse et respectueuse des libertés. Peut être fallait-il lui accorder la parole, l’écouter, puis la juger. Elle affirme être laïque et athée, c’est son droit. Etant écrivain et non pas politique, elle ignore la tactique du Batini et du Dhahiri. Elle a souffert du despotisme de ses compatriotes hommes, elle souffre pour ses compatriotes femmes humiliées, elle a exprimé sa rébellion au moyen de sa plume. L’attitude de méfiance du gouvernement français à l’égard d’un écrivain qui dénonce l’obscurantisme et la barbarie est de nature à décourager tous ceux qui s’opposent aux dictateurs, aux despotes, elle conforte les sang-voix dans leur passivité résignée et leur silence complice. «A quoi bon lutter, à quoi bon affronter la mort, si les pays de Démocratie ancienne sont terrorisés par les terroristes et qu’ils nous lâchent», voilà ce que disent les menés-nés autour de moi!
Les hommes et les femmes libres de France, les intellectuels, les libres penseurs, les démocrates, enfin tous les Français convaincus des libertés et des Droits de l’Homme feront en sorte que Taslima Nasreen accède au pays de la lumière et y séjourne tant qu’elle le désirera.
La leçon à tirer de cette affaire est que nous devons compter d’abord et surtout sur nous mêmes. Je n’ai encore rien lu de Taslima Nasreen. Elle tiendrait des propos blasphématoires envers le Coran? Je connais tellement de personnes soit-disant pieuses et respectables, qui ont fait le pélerinage et accomplissent les prières et le jeûne, mais qui sont en réalité des mécréants, des voleurs, des s… Dieu saura reconnaitre les siens!
La femme tunisienne a plus d’un quart de siècle d’avance sur Taslima (38 ans). «Les gens heureux n’ont pas d’Histoire» dit-on, c’est pour cela que j’incite les femmes tunisiennes à s’intéresser à la condition de femmes du monde arabo-musulman, pour réaliser leur chance d’avoir eu comme père Bourguiba et comme frère Ben Ali, et ce qu’elles perdraient en omettant de rester sur leurs gardes – Que de Rois se sont crus éternels!!