L’heure est grave, et le Chef de l’Etat est garant de la stabilité du pays, de sa tranquillité et de son développement sur tous les plans. Il est responsable du devenir du pays, comme nous tous, mais à un degré supérieur; il a besoin de notre solidarité, de notre confiance en lui, de notre honnêteté intellectuelle.
Le pays est en péril, du moins il l’était. Le Président a su manœuvrer pour éviter à la Tunisie la pire des calamités: un Etat théocratique, avec toutes les conséquences de fait et de droit, allant du totalitarisme à l’esclavage des femmes, à la poussée démographique, au règne des émirs- épouvantails et des gueux.
L’heure est grave, et tout juriste qui a écouté la conférence de presse du ministre de l’Intérieur, révélant le complot des intégristes, ne peut s’arrêter aux mots. Une certaine construction de la pensée, acquise à la manipulation du droit, pénal surtout, lui fait penser tout de suite aux articles 69-72-74 et 76 du Code pénal.
Ainsi, l’article 69 dispose: «Il y a complot dès que la résolution d’agir est concertée et arrêtée entre deux personnes ou plus».
L’article 72 : est puni de mort l’attentat ayant pour but de changer la forme du gouvernement, d’inciter les habitants à s’armer les uns contre les autres ou de porter le désordre, le meurtre et le pillage sur le territoire tunisien».
L’article 74 : «Est puni de mort quiconque rassemble et arme des bandes ou se met à la tête de bandes dans le but soit de piller… soit enfin d’attaquer la force publique agissant contre les auteurs de ces attentats ou de lui faire résistance».
L’article 76 : «Est puni de mort quiconque incendie, ou détruit à l’aide d’un explosif, des édifices, des magasins de munitions ou d’autres propriétés appartenant à l’Etat».
Et ce ne sont pas les seuls articles. Je sais que nul n’est censé ignorer la loi mais , si je le rappelle, c’est pour mettre chacun devant ses responsabilités. Nous sommes libres de nos opinions, et nous devons les assumer jusqu’au bout. Je m’explique : les opinions de masse m’incommodent; elles sont comme des tableaux impressionnistes : on saisit le tout, mais pas le détail.
Il faut que chacun de nous sorte individuellement de la masse et de l’ombre et qu’on voit bien son pouce: dirigé vers le bas pour la mise à mort, puisque tel est le châtiment légal des traitres à la patrie, ou dirigé vers le haut pour qu’on tourne la page (comme toujours, parce que les Tunisiens sont des doux, des tendres, des agneaux), ou qu’il se croise les bras car il ne veut pas se mouiller (il ne faut pas cracher sur l’avenir, n’est-ce pas?).
Je suis sûre que M. Ben Ali n’a aucun ressentiment particulier. Il a évité au pays la guerre civile, c’est aux citoyens de défendre leur forme de société. Si le peuple veut la Démocratie, qu’il arrête de chercher des boucs émissaires parmi ses dirigeants. Il doit choisir entre un Etat théocratique sous le règne des mollahs et de la Chariaâ, et une société moderne guidée par l’islam. Il doit réaliser tout seul s’il est en état de légitime défense ou non.
Ce complot implique trois cents personnes; si les éléments des infractions sont vraiment réunis, les juges devront appliquer la loi. Les peines sont très graves: remplir les prisons à perpétuité ou envoyer des êtres humains à la potence n’est pas simple. C’est pour cela qu’il faut être prudent: seules les lois devront trancher, car nous sommes un Etat de droit.
Quand la justice rendra son verdict, de l’acquittement à la peine de mort, elle n’aura fait que défendre la société sur laquelle elle veille.
Que toutes les ligues des droits de l’homme, qu’Amnesty International, que la presse étrangère s’en mêlent, cela ne doit pas nous déranger. Tant que la loi est respectée, tant que la procédure est rigoureusement suivie, la Justice reste souveraine. Dieu merci, il n’y a plus de président de tribunal fantoche, ni de procès préfabriqués. Je n’ai pas l’ombre d’un doute que tout se passera dans la légalité.
Maître Mourou est placé dans le collimateur d’un journal de la place. J’ignore s’il est impliqué dans le désir de déstabilisation du pays; j’ignore tout de ses activités. Il est juste pour moi un confrère dont j’apprécie la courtoisie, le savoir-vivre et l’intelligence. Cependant, je tiens à dire qu’avant de jeter quelqu’un en pâture au public, avant de commanditer un lynchage médiatique, on doit s’assurer qu’on est en droit de le faire. C’est la Justice qui décide de la culpabilité.
Et on ne doit pas oublier que nous sommes tous présumés innocents jusqu’à preuve du contraire.